Cuba e Angola

Dagmara - 3 février 2020

Etre cubain en Angola ? D'une certaine façon c'est comme être à la maison !

Les noms de quartiers, de rues, les expressions, les plats typiques, la musique… autant de choses dans mon quotidien qui me rappellent mon île. Beaucoup de personnes me demandent pourquoi être cubain à Luanda est synonyme d’intégration. Pour répondre à cette question, je vais vous parler d’une relation qui a commencée il y a presque 60 ans et pour cela il devient impératif d'entrer dans l'histoire de l’Angola.

La guerre d'indépendance :

Entre 1961 et 1970, une période de confrontation a éclaté entre les forces armées portugaises et les forces organisées par les mouvements de libération des colonies portugaises, la Guinée Bissau, le Mozambique, Sao Tomé et Principe, le Cap-Vert et l’Angola.

Le début de cet épisode de l'histoire militaire du Portugal eut lieu en Angola le 4 février 1961, dans la zone qu'on désignait alors comme Zone Insurgée du Nord (Zona sublevada do Norte, ZSN). Ce même jour les membres du MPLA ( Movimiento Popular de la Liberación d' Angola) attaquent la prison de Luanda afin de libérer les prisonniers politiques et massacrent 2 000 colons portugais. Les représailles de l’armée portugaise font 10 000 victimes dans la communauté noire et des centaines de milliers d’Angolais doivent fuir vers le Congo-Léopolville.

Le Portugal est présent avec un contingent d'environ 200 000 hommes venus de métropole et des corps de colons volontaires. Trois groupes armés se constituent en face :

Comment Cuba entre-t-il dans l'histoire de l'Angola?                    Visite d'Ernesto Che Guevara au bureau du MPLA en 1965                                                    

En 1965, le commandant Ernesto Che Guevara rencontre Agostinho Neto à Brazzaville où se trouvait le personnel du MPLA. Accompagné de Jorge Risque et Rafael Moracen Limonta, Guevara propose à Agostinho Neto son expérience dans la lutte de guérilla pour la préparation militaires des soldats angolais. A partir de ce moment, le MPLA commence à recevoir le soutien de Cuba dans sa lutte pour l’indépendance.

 

 

Portugal, 25 avril 1974 Révolution des OeilletsLe soulèvement militaire du MFA (Movimiento das Forças Armadas) le 25 avril 1974, également connu sous le nom de La Révolution des Oeillets, met fin à la dictature salazariste, qui dominait le Portugal depuis 1926. Établissant ainsi un nouveau gouvernement qui était en faveur de la souveraineté des colonies. En 1974, l'indépendance  est accordée à la Guinée-Bissau, puis au Mozambique, au Cap-Vert, à Sao Tomé-et-Principe et enfin à l’Angola.

Le traité d'Alvor signé le 15 janvier 1975 à Alvor, au Portugal pour  les mouvements de libération UNITA, FNLA, MPLA et le  nouveau gouvernement portugais , a accordé la liberté à l'Angola. Elle deviendra effective le 11 novembre de la même année, mettant ainsi fin à la guerre d'indépendance angolaise.

La lutte pour le pouvoir :

Le gouvernement provisoire établi en Angola par l'accord d'Alvor, est tombé rapidement en raison des sentiments nationalistes des différentes factions, qui doutaient les unes des autres : chacune a essayé de prendre le contrôle du gouvernement par la force, provoquant la guerre civile angolaise.

A l'approche de la date de l'indépendance (11 novembre 1975), la capitale Luanda, contrôlée par le MPLA, devient un objectif politique et militaire fondamental pour la proclamation de la naissance de la nouvelle nation. En octobre 1975, anticipant la date fixée pour la décolonisation, l'armée sud-africaine occupe Cunene dans le sud, tandis que les forces zaïroises ainsi que des groupes armés et soutenus par la Zambie entrent dans le pays par le nord. Le FNLA (Front national pour la libération de l'Angola) et les armées alliées ont avancé en direction de la capitale dans le but de s'emparer de la ville et d'y faire la proclamation d'indépendance, expulsant le MPLA.       

 

La colonne du FNLA, qui descend du nord, parvient à atteindre Cacuaco (municipalité qui sépare Luanda de Bengo). Ces groupes : l'UNITA et le FNLA, étaient armés et soutenus financièrement par les États-Unis, la France et la Chine principalement.

 

Pour y faire face, le MPLA demande l'aide militaire de l'Union soviétique et de Cuba.

Le gouvernement cubain répond à la demande du MPLA et envoie dans un premier temps des instructeurs militaires cubains qui s'installent à Benguela et créent une école d'entraînement. Devant l'imminence de l'attaque du FNLA et de ses forces alliées, le président du MPLA Agostinho Neto demande plus d'aide à Cuba. Le 5 novembre 1975, le gouvernement cubain s’implique directement avec l'envoi de troupes. Cette intervention de l'armée cubaine dans la guerre civile en Angola a été appelée «Opération Carlota». Pour créer la surprise, les premières troupes cubaines sont arrivées discrètement et pour éviter d'attirer l'attention de l’ennemi : la plupart des soldats envoyés étaient noirs.

Batalle de Kifangondo

Le 10 novembre 1975, les FAPLA (Forces armées populaires de libération de l'Angola) et l'armée cubaine ont établi leurs positions défensives à Kifangondo où ils détruisent le pont, et bloquent ainsi la route vers la capitale. Grâce au courage et à la stratégie militaire de l'armée au combat, l’ennemi est neutralisé. Aujourd’hui, vous pouvez visiter le monument de la bataille de Kifangondo construit à la mémoire de tous les soldats qui ont perdu la vie ce jour et en particulier le colonel Raúl Díaz Argüelles, mort sur une mine, qui commandait l'armée cubaine à côté de Leopoldo Cintra Frías.

Ce fut la bataille décisive qui permit à Agostinho Neto de proclamer l'indépendance de l'Angola le 11 novembre 1975 et d’acceder à la présidence du pays.

Le FNLA et l'UNITA procédèrent à des auto-proclamations similaires dans les zones qu'ils contrôlaient.

Mais Kifangondo n’a pas été la seule grande bataille menée par le FAPLA et l'armée cubaine, ce n'était que le début des 13 années de guerre civile qui ont suivi.

Bataillon cubain à Cuito Canavale

 

Impossible de parler d'histoire entre l'Angola et Cuba sans évoquer la bataille de Cuito Canavale, bataille qui a duré près d'un an (entre 1987 et 1988). Elle est connue pour de nombreux historiens comme le "Stalingrad sud-africain" pour le coût énorme de la défaite au combat, qui a conduit l'Afrique du Sud à mettre fin à ses opérations en Angola.
Les Cubains et les Angolais  ont ensemble vaincu pleinement les envahisseurs sud-africains et ont réaffirmé la souveraineté de cette nation africaine.

300 000 combattants et 50 000 collaborateurs civils cubains ont participé aux 15 ans de l'opération Carlota. Pas moins de 2 077 Cubains sont morts sur les terres angolaise. C'est la plus grande opération militaire de Cuba à l'étranger qui a permis la victoire du MPLA et a contribué à l'affaiblissement du régime raciste d'Apartheid en Afrique du Sud, qui est tombé peu de temps après. Le 13 décembre 1988, un accord a été signé entre l'Afrique du Sud, Cuba et l'Angola mettant fin à la guerre civile et donnant naissance à l'indépendance de la Namibie.

La coopération civile :

Médecins cubains

Mais Cuba n'a pas seulement collaboré avec les forces militaires. Depuis 1977 les Cubains ont également amené des médecins, des enseignants et des ingénieurs. L'assistance médicale cubaine était si importante que l'espagnol est devenu la langue de la médecine en Angola. La création d’une bourse d'études a permis à des angolais  d'étudier dans les universités cubaines. Aujourd'hui, plus de 194 000 étudiants (médecins, techniciens, ingénieurs, entre autres) ont obtenu leur diplôme à Cuba. Cet aspect clé des relations angolaises-cubaines existe toujours à ce jour.

Cuba e Angola, liés à jamais...

Il fût difficile de vous écrire cet article car l'Angola n'a pas d'archive officielle qui raconte sa Vraie Histoire. Peut-être parce que c'est une guerre récente. Grace aux archives cubaines et aux témoignages de personnes qui l'ont vécue, je peux aujourd'hui partager cette Histoire avec vous. Je remercie d'ailleurs le Général  Rafael Moracen Limonta  et le Secrétaire des Communications Institutionnelles et des Affaire de Presse Sr Luis Fernando pour le temps qu'il m'ont accordé.

Probablement je quitterai ce pays dans quelques mois, et bien que je ne sache pas ce que me réserve l'avenir, peu importe où j'irai, je garderai pour toujours un bout d'Angola dans mon coeur ! Et comme on dit en Angola autant qu'à Cuba : La luta continua e a victória é certa !

 

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